Bénéfices / risques de la coloscopie

Gustave Austin
9 mars 2023
3 min de lecture
Mis à jour le 9 mars 2024

Si certains considèrent la coloscopie comme « l’arme absolue contre le CCR », c’est compter sans les limites, inconvénients et risques d’une telle stratégie de dépistage.

Bénéfices théoriques de la coloscopie

Plusieurs études cas-témoins ont démontré que l’endoscopie permet en théorie de diminuer l’incidence et la mortalité par CCR dans la zone explorée. Deux études de cohortes ont démontré que la polypectomie réalisée au cours de la coloscopie permet de diminuer l’incidence du CCR. Deux études américaines publiées en 2000 ont montré que la moitié des adénomes avancés et cancers des colons droit et transverse était manquée par une stratégie de dépistage fondée sur la recto-sigmoïdoscopie : de fait 1,5 à 2,7 % de la population étudiée avaient un adénome avancé ou un CCR des colons droit ou transverse sans lésion «sentinelle» du rectum ou du sigmoïde.

Ces bénéfices théoriques ont été montés en épingle aux USA dans les années 2000 et ont conduit certaines sociétés savantes (American College of Gastroenterology) à recommander la réalisation d’une coloscopie tous les 10 ans après l’âge de 50 ans comme stratégie de dépistage privilégiée. Ces recommandations relayées par quelques journalistes (Katie Couric) ont provoqué en quelques semaines une augmentation de 20 % du nombre de coloscopies réalisées aux USA !

Limites, inconvénients et risques de la coloscopie de dépistage chez les personnes à risque moyen de CCR

La preuve de l’efficacité d’une stratégie de dépistage reposant sur la coloscopie chez les personnes à risque moyen n’est pas faite : aucune étude randomisée n’a jamais été réalisée pour évaluer une telle stratégie.

L’acceptabilité de la coloscopie n’est pas connue, probablement faible.

L’accès à la coloscopie est un facteur limitant évident : il y a en 2004 en France 15,8 millions de personnes âgées de 50 à 74 ans. Si l’on exclut 5 % de personnes qui ne relèvent pas d’un dépistage en raison d’une maladie grave intercurrente et si l’on propose la réalisation d’une coloscopie tous les 10 ans cela conduit à la réalisation d’1,5 million de coloscopies par an, soit 500 coloscopies annuelles par gastroentérologue !

Les accidents de coloscopie sont certes très rares mais la réalisation d’1,5 million de coloscopies de dépistage entraînerait chaque année 4500 accidents (3/1000) conduisant à 1500 interventions chirurgicales (1/1000) et à 150 décès (1/10 000).

Le coût de la coloscopie est élevé, rendant prohibitif le coût d’une telle stratégie de dépistage.

Bien que la coloscopie soit l’examen de référence, le plus sensible et le plus spécifique pour le diagnostic des adénomes et cancers colorectaux, ses performances diagnostiques ne sont pas absolues : l’exploration complète du colon n’est pas possible dans 5 % des cas. La coloscopie manque le diagnostic de 15 à 25 % des adénomes de moins de 1 cm, de 0 à 6 % des adénomes de plus de 1 cm et de 4 % des cancers du colon droit.

Gustave Austin
Auteur
Gustave Austin

Je suis Gustave Austin, professeur à l'Université de Lorraine spécialisé en physiologie et contrôle de l'équilibre. Je travaille également en tant que médecin en oto-rhino-laryngologie à l'hôpital universitaire de Nancy, en France. Mes recherches portent sur l'évaluation des modifications des stratégies de contrôle de l'équilibre en fonction de facteurs tels que le vieillissement, l'activité physique, les maladies, la susceptibilité au mal des transports, la gestion des tâches multiples et les programmes de rééducation.